Odilon
REDON

(1840 - 1916)

Avant d’être l’artiste que le monde de l’art connait, Odilon Redon est un être solitaire tiraillé entre deux mondes, le monde bourgeois de son enfance ; il nait à Bordeaux en 1840 au sein d’une famille relativement aisée, et le monde de l’artiste peintre, solitaire et besogneux.

Alors enfant, Odilon Redon est un contemplatif : les moments qu’il passe dans son domaine de Peyrelebade, dans le Médoc, près de Bordeaux, représentent pour lui une immense source de plaisir. Tout d’abord, il y rencontre la nature, sujet d’émerveillement pour lui. C’est un homme de la terre, marqué par ses paysages verdoyants et ses vignes. Il se remémorera souvent sa jeunesse passée là-bas, la douceur et la lenteur du temps, ainsi que les grands espaces sombres de ses appartements, apprivoisant l’obscurité qu’il projettera bientôt sur la toile. Il expérimente aussi, dans cette grande maison, la solitude et c’est dès ce moment qu’il  commence à développer cet imaginaire fantastique, sombre et mystérieux. 

Il néglige ses études. On essaie de le présenter à un concours d’architecture, sans succès. Il entre aux Beaux-Arts et la première étape dans l’affirmation de son indépendance correspond à son départ de l’atelier du peintre Jean-Léon Gérôme, qui lui permet de conserver, même douloureusement, sa liberté. Puis vient le dilemme que lui présente son professeur particulier, l’aquarelliste Stanislas Gorin, lui intimant de choisir entre une existence bourgeoise mais sûre ou une vie d’artiste passionnante mais incertaine.
Le graveur bordelais Rodolphe Bresdin fut aussi l’un de ses maîtres. Ce dernier, vivant dans une grande simplicité, pour ne pas employer le mot de misère, « au mépris et au rebours apparents de toute considération économique et sociale », inculque à Redon des enseignements autour de la réalisation artistique qui le marqueront durablement. 

Le botaniste Armand Clavaud est une autre de ses sources d’inspiration. Dessinateur et ami d’Odilon Redon, occupe le poste de professeur en botanique puis de conservateur de la bibliothèque du Jardin botanique de Bordeaux. C’est par son entremise que Redon pénètre dans le monde de la botanique et de ses formes si singulières. Armand Clavaud, par son activité de botaniste, tenait des cahiers de croquis dans lesquels il prenait soin de reproduire des schémas de plantes, plus ou moins détaillés et stylisés, qui ont véritablement fasciné Redon. Son intérêt est tel pour ces représentations qu’il s’en inspirera directement pour la réalisation de ses premières lithographies.

En 1880 qu’Odilon Redon lance une grande série de fusain sobrement intitulée Les Noirs, qui posent le socle sur lequel l’artiste s’appuiera pour émerger sur la scène artistique. Ces fusains font généralement partie de plusieurs albums qui paraissent à quelques exemplaires. Ils explorent le monde du rêve, du songe et de l’étrange. On y retrouve l’héritage du botaniste Armand Clavaud, car les formes se succèdent, a moitié humaines, en germination et tentant de s’élever à un niveau supérieur. 

Au début des années 1890, l’artiste se questionne sur le fusain et sur le noir, il considère, peut-être qu’il arrive à la fin d’un processus créatif et envisage alors la couleur. Cette nouvelle inquiète son entourage, celui de ses amis et de ses collectionneurs, mais c’est le début d’une grande et riche période de création. En 1893, le Baron de Domecy lui commande dix-huit panneaux décoratifs pour la salle à manger de son château de l’Yonne. Odilon Redon, fidèle à son caractère, continue d’explorer les formes et les motifs, mais cette fois-ci en couleur et à l’aide du pastel. C’est une véritable explosion de couleurs et de végétaux qui inondent les panneaux de cette salle à manger. Bien plus tard, en 1910, il est à nouveau amené à réaliser de grandes fresques colorées, cette fois ci pour un nouveau collectionneur et ami, Gustave Fayet. C’est à l’Abbaye de Fontfroide, au cœur du domaine des Corbières, que  Fayet demande à l’artiste d’habiller sa bibliothèque personnelle de gigantesques fresques colorées, sobrement intitulées, Le Jour, La Nuit et Le Silence. 

Au seuil de sa vie, Odilon Redon laisse une quantité impressionnante de dessins et de peintures. D’une fraicheur et d’une audace sans cesse renouvelée, l’artiste de nature timide et solitaire, n’a jamais cessé de créer tout au long de sa vie avec toujours le même enthousiasme qu’à ses débuts. Ce maître du symbolisme, du rêve et de l’esprit meurt le 6 juillet 1916 à son domicile du 129 avenue de Wagram dans le 17ème arrondissement de Paris.

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